Santé des détenus en Nouvelle Aquitaine : un équilibre fragile situé entre impératifs sanitaires et impératifs de sécurité.

  Publié en octobre 2018
Santé des détenus en Nouvelle Aquitaine : un équilibre fragile situé entre impératifs sanitaires et impératifs de sécurité.
Le 15 octobre à Bordeaux s’est déroulée la journée régionale « santé des détenus en Nouvelle Aquitaine », organisée par l’Agence Régionale de la Santé Nouvelle Aquitaine et la Direction Interrégionale des Services Pénitentiaires de Bordeaux.
Durant cette journée, différents temps d’échanges ont permis aux participants d’aborder plusieurs problématiques sur la santé des personnes détenues (les enjeux du secret partagé, la réduction des risques des conduites addictives, déploiement de la télémédecine en unité sanitaire… ).
 
C’est dans ce cadre que NovaScopia a présenté les résultats du diagnostic « Santé Nutrition en détention ». Nous travaillons depuis plusieurs années sur la prise en compte des déterminants de santé en milieu pénitentiaire. Le sujet reste sensible et encore peu exploré. Pour autant, les efforts à réaliser sont importants. Ils nécessitent une étroite coopération entre la direction des établissements pénitentiaires et les équipes soignantes des Unités Sanitaires. Cela revient à s’interroger sur des enjeux touchant aussi bien aux conditions d’accès aux soins qu’aux conditions de sécurité et de travail des personnels soignant et surveillant. A l’époque, les premiers travaux avaient permis de partager une série de constats sur lesquels il était important d’agir :
  • Des carences alimentaires importantes sur certains nutriments ;
  • L’observation d’une hausse des maladies chroniques sur certains établissements ;
  • Des difficultés pour assurer un régime alimentaire adapté à la pathologie du patient détenu ;
  • Des prescriptions thérapeutiques peu suivies.
 
Ce travail s’inscrit aujourd’hui dans un projet plus large porté par l’association CARALIM. Il est le fruit du croisement d’une enquête auprès des Unités Sanitaires de la région, d’échanges avec les directions d’administrations pénitentiaires et d’entretiens avec différents partenaires des actions (moniteurs sportifs, diététiciens, SPIP, acteurs associatifs, personnels de l’éducation nationale…).
 
Si de nombreuses actions (ateliers cuisine, actions de sensibilisations aux repères nutritionnels, amélioration des grilles de cantinage…) ont fait la preuve de leur capacité à répondre à des enjeux sanitaires complexes, elles sont généralement marquées par leur caractère expérimental/ponctuel et par un nombre restreint de bénéficiaires. Il est nécessaire de réfléchir aux conditions de « généralisation » de ces actions afin de permettre à une population carcérale plus nombreuse d’en bénéficier et ainsi en amplifier les impacts sanitaires et sociaux positifs (Financements pluriannuels, aide au montage des dossiers de financements…)
 
A l’issue de ce diagnostic, plusieurs messages clés sont relevés :
 
  1. L’alimentation et l’activité physique et sportive constituent des leviers pertinents pour améliorer/préserver la santé des personnes détenues.
  2. Les actions, plutôt hétérogènes, sont à inscrire dans une stratégie plus globale de prévention et de promotion de la santé à définir à l’échelon régional (pour tenir compte de la situation différenciée des établissements pénitentiaires en matière de durée de détention et de moyens déployés). Il est nécessaire de définir des stratégies à l’échelle de chaque établissement qui puissent à la fois prendre en compte les enjeux de moyens humains (au sein des US mais aussi d’effectifs de moniteurs sportifs ou de compétences des personnels affectés aux cuisines); et la volonté d’inscrire les interventions dans une stratégie de lutte contre les inégalités sociales de santé.
  3. La démarche évaluative est relativement rare et ne permet pas encore la mise en place d’une fonction de pilotage axée sur des objectifs de résultats auprès des personnes détenues. A terme, une définition plus partagée des indicateurs sera essentielle pour évaluer les impacts des actions de prévention au niveau de chaque établissement.
  4. Les modalités de sensibilisation sont essentiellement réalisées sous forme d’atelier qui doivent évoluer pour prendre en compte les contraintes et problématiques du milieu pénitentiaire. Un format/protocole spécifique doit être élaboré pour mieux prendre en compte les parcours de santé des personnes détenues. Dans cette optique, des axes stratégiques devront être discutés pour chaque comité AES et faire l’objet d’approches plus individuelles afin de cibler certaines thématiques (éducation thérapeutique du patient, santé bucco-dentaire, tabagisme) et de prioriser des publics (Jeunes de moins de 25 ans, femmes, hommes atteints de maladie chronique, etc…)
Top